Avocats français : En avant marche !
Une seule tête, au pas de l’oie !

Note explicative au barreau étranger intéressé :

1ère Question :
Comment accepter que l’Ordre des avocats de Paris (France) puisse rendre une décision empêchant un avocat de travailler et l’obliger à se dessaisir de sa clientèle, au seul motif qu’en intitulant la mesure ordonnée «d’interdiction provisoire», sa décision n’aurait pas la nature de «peine» alors que dans les faits elle en a tous les attributs ?

La suspension professionnelle nommée «provisoire» prévue à l’article 23 de la loi du 31 juillet 1971 régissant la profession d’avocat (donc promulguée antérieurement à l’application de la convention européenne des droits de l’homme) – a dans la réalité toutes les caractéristiques d’une peine en ses effets, puisqu’il y a dessaisissement total pour l’avocat concerné de tous ses dossiers et interdiction de son droit d’exercer sa profession sur décision de l’Ordre des avocats.

Il y a bien intrusion – avant toute décision judiciaire définitive - d’un tiers désigné « administrateur » du cabinet de l’avocat par une autorité disposant d’un pouvoir judiciaire qui décide de s’approprier les dossiers de cet avocat et d’interdire à ses clients, donc à des tiers à la profession, son libre choix de l’avocat en lui imposant un nouvel avocat qui prendra connaissance de son affaire sans en avoir obtenu le mandat (en violation du principe de la confidentialité) pour y donner la suite qu’il estimera nécessairement, laquelle n’est pas celle que le client souhaitait.

En effet l’avocat qui subie cette mesure, est privé du droit de désigner son remplaçant.

Il y a donc une entrave au libre choix de l’avocat. Ainsi, un client étranger pourrait se voir imposer un avocat qu’il n’aurait pas choisi, mais aussi pourrait se voir obligé par une décision à laquelle il n’est pas partie, se verrait privé de son conseil et imposer une défense qu’il n’a pas librement choisie.

L’Ordre en décidant de façon discrétionnaire en sa qualité de juridiction disciplinaire, ne peut être que partial puisque c’est son bâtonnier qui prend la décision d’engager des poursuites contre l’avocat. Celui qui représente l’entité unitaire de «conseil de l’Ordre» n’offre aucune garantie d’impartialité ni d’équité. Ce système consacre une confusion entre l’accusation, l’instruction et l’instance de jugement, toutes fonctions englobées sous le même organisme d’Ordre des avocats.

Cet article 23 de la loi du 31 décembre 1971 régissant la profession d’avocat apparaît dès lors plus comme une arme mise à la disposition d’un groupe par le pouvoir politique pour lui permettre d’intervenir dans le cours d’un procès ou maintenir une ligne politique.

 Ainsi tout avocat qui s’en prendrait au gouvernement et à ses membres pourrait faire l’objet d’une mesure d’interdiction provisoire discrétionnaire sur ordre donné au Bâtonnier. Ceci explique que cette fonction soit exercée soit par des ambitieux soit par des hommes sans envergure.

Or cette mesure «d’interdiction provisoire» ne diffère en rien en ses effets de «l’interdiction de temporaire» qui elle, a la qualité de peine parce qu’elle résulte d’une décision de jugement, qu’elle doit être motivée et qu’elle bénéficie du double degré de juridiction.

Nonobstant elle s’en distingue dans la forme parce qu’elle est rendue sans motivation, qu’elle intervienne avant toute condamnation ou, pire encore, après condamnation. Elle est  donc le fait du prince et donne un pouvoir exorbitant à celui qui en dispose pour contourner par exemple le principe supérieur de l’effet suspensif des recours.

Elle émane du seul juge de première instance, avant ou après sa décision, sans qu’aucune juridiction de second degré ne soit en droit d’en vérifier ni le bien fondé ni sa légalité. Par comparaison en matière pénale, le juge d’instruction a le droit d’ordonner la détention provisoire, mais cette mesure reste sous le contrôle du double degré : la Chambre de l’instruction. La suspension «provisoire» qui ne se distingue pas concrètement de la détention temporaire se voit, quant à elle, interdite de confusion.

Il est ainsi établi, pour les seuls avocats, une double peine cumulée.

Si elle intervient après la condamnation à une peine, elle constitue simple détournement du droit général pour priver l’avocat condamné de l’effet suspensif de la voie d’appel et devient arme d’une vengeance personnelle, preuve de la partialité et du manque d’équité d’un Ordre (capable de soutenir devant la même Cour et le même jour tantôt l’absence de confusion et tantôt la confusion selon la personne de l’avocat concerné – arrêts des 1er et 2 juillet 2003 CA PARIS 1ère Chambre A).

Ainsi la loi du 31 décembre 1971 donne un pouvoir extraordinaire et discrétionnaire à une juridiction professionnelle : celui d’infliger sa propre peine féodale avant tout procès définitif, sans qu’un texte particulier ne vienne déroger ni aux principes généraux du droit ni à celui de la procédure. La porte est ainsi ouverte à tous les abus et toutes les combinationes.

Ce texte de loi contrevient évidemment à l’article 7 de la CEDH «Nulla poene sine lege»

En droit, celui qui est condamné à cette mesure de suspension provisoire a, de fait, immédiatement épuisé toutes les voies de recours, de sorte qu’il peut saisir la Cour Européenne des droits de l’Homme pour se plaindre de ce que l’article 23 de la loi du 31 décembre 1971 est contraire à la CEDH et aux principes du droit européen.

En l’espèce la peine de radiation a été annulée par l’effet de l’arrêt du 2 avril 2003 de la Cour d’Appel, or l’originalité fait que nonobstant l’infirmation générale, une partie de la décision infirmée est validée, au seul motif qu’aucune loi ne prévoirait que la suspension provisoire pourrait être confondue avec la suspension temporaire, alors qu’il était du pouvoir de la Cour d’infirmer la totalité de la décision soumise à son contrôle. Le maintien d’une partie de la décision infirmée est donc hors la loi.

Concrètement dans le cas d’espèce, la condamnation à suspension temporaire de 12 mois, oblige l’avocat à subir une suspension réelle de 12 + 4 mois (période du 17 décembre 2002 au 9 avril 2003) = 16 mois, il faudra donc bien que l’Ordre des avocats de Paris, responsable de ce supplément, en assume la charge.

Ce complément de suspension est uniquement arbitraire car il ne peut plus être justifié par une décision du 17 décembre 2002 infirmée. Cette nullité partielle n’aurait pu avoir d’effet que si les juges du second degré en avaient décidé ainsi. Or sur ce point précis, la Cour ne disposait d’aucun pouvoir puisque la prérogative de l’article 23 n’appartient qu’au seul conseil de l’Ordre. (Cour de Cassation 1er Civ. 22 mai 2002 – Juris data n° 2002-014426 et GP 29 août 2002)

L’arrêt de la Cour de Cassation du 15 mai 2002 (GP ibid.) précise dans un arrêt de règlement, que le Conseil de l’Ordre peut seul décider de mettre fin à la mesure de suspension provisoire de manière discrétionnaire, comme si le discrétionnaire pouvait être acceptable en droit français.

Ces décisions posent plus généralement le principe du privilège (même négatif) d’une juridiction particulière pour les seuls avocats, contrairement au principe supérieur de l’égalité de tous les citoyens devant la justice et viole donc l’article 14 de la CEDH.

2ème question :
Comment une peine peut-elle être déclarée exécutoire aussi longtemps que les voies de recours n'ont pas été épuisées ?

En l’espèce, un avocat subit les effets d’une interdiction temporaire, alors que son recours est toujours soumis au contrôle de la Cour de Cassation.

Imaginons un condamné à mort, devra-t-il être exécuté avant qu’il ne soit réhabilité par la Cour de Cassation ?

L’intérêt de la question :

Avant le décret du 27 novembre 1991 et a fortiori avant le 15 juin 2000, le recours devant la Cour de Cassation était suspensif. C’est-à-dire qu’on attendait que l’affaire soit jugée définitivement avant d’obliger l’intéressé à accomplir sa peine.

Il est donc curieux qu’une loi postérieure, fondée sur le noble principe du respect de la présomption d’innocence n’ait pas pensé à modifier ce bel exemple d’injustice qui revient à priver de la présomption d’innocence les seuls avocats. L’avocat est présumé coupable par ses pairs, surtout s’il défend trop bien ses clients.

Ce principe était respecté avant novembre 1991(La Cour de cassation, arrêt du 26 mai 1993 n°835 casse et annule une décision qui dit que la durée de suspension court à compter de la notification de l’arrêt  - comme cela est dit actuellement. Il s’agissait d’appliquer l’article 124 du décret n°72-468 du 9 juin 1972 qui justement a été abrogé par le décret de 1991)

L’effet suspensif du pourvoi en cassation à l’encontre des décisions disciplinaires était consacré par l’article 124 du décret n°72- 468 du 9 juin 1972 lequel a été abrogé par le décret du 27 nov. 1991 sur les avocats (article 282 al.1 dans le code de procédure civile), ce qui n’était que le rappel d’un principe supérieur.

Or ce principe fondamental « institutionnel », confirmé par la CEDH - notamment – par l’article 7 «nulla poene sine lege», pouvait-il être abrogé par un simple décret, c’est-à-dire par un gouvernement et non pas par le législatif, faisant que la peine n’est que la conséquence d’un décret et non pas d’une loi ?

Cette abrogation viole un principe fondamental régi sous l’empire de la CEDH déjà en application, sans que cela ne gêne personne et surtout pas le cercle fermé des avocats de l’Ordre de Paris, trop soucieux de garder leurs privilèges  et de maintenir la discrimination entre avocats dominants et avocats dominés.

Or la suprématie de la convention de sauvegarde européenne des droits de l’Homme s’impose à tous les états membres et plus particulièrement à la France en application de l’article 55 de la constitution française qui règle la suprématie des traités sur la loi interne. (Les traités régulièrement signés priment sur le droit interne).

Cette disposition qui oblige un avocat à subir sa peine par une exclusion immédiate de la profession, alors qu’il n’est pas définitivement condamné, est donc anticonstitutionnelle.

La manipulation intellectuelle est la suivante :

Pour éviter que la décision d’appel soit suspendue à la décision de la Cour de Cassation, il a suffit d’indiquer que la procédure disciplinaire avait un caractère civil, de sorte que, comme en matière civile, le pourvoi en cassation n’a pas d’effet suspensif.

Or il n’est pas douteux que la décision disciplinaire ne condamne pas l’avocat à des dommages et intérêts pour une faute civile, ni ne répare un dommage causé à autrui, mais décide ou non d’une peine grave touchant à l’honneur de sa personne, comme en matière pénale.

Ainsi les règles de la procédure civile ne peuvent s’appliquer à la procédure disciplinaire, les principes d’un manquement à l’honneur, à la probité ou aux bonnes mœurs qui excluent du bénéfice de l’amnistie, étant des critères de qualifications de faits rattachés à la seule procédure pénale.

L’article 277 de la loi du 31 décembre 1971 en ce qu’il institue artificiellement un caractère civil à la procédure disciplinaire, est non seulement contraire à la constitution, mais a fortiori à la convention européenne des droits de l’homme.

Il s’agit d’une arme mis par le politique à disposition d’un organe professionnel de contrôle institué par Pétain, pour maintenir les avocats dans un lien de dépendance, en contradiction de leur serment, chargé de les obliger à abjurer leur serment d’indépendance. Il y a donc tromperie obligée et instituée au préjudice des justiciables qui ont recours à un avocat pour leur défense, en contradiction avec les dispositions de l’article 434-8 du code Pénal qui interdit et punit «Toute menace ou tout acte d’intimidation envers un avocat ». 

Manifestement la défense n’est pas libre en France puisqu’elle est soumise dans les faits au contrôle de l’Ordre des avocats qui dispose du pouvoir évident de contraindre au silence celui qui indispose et de lui imposer ses vues sous la menace lorsque la mesure de psychiatrie plus discrète imaginée par un secrétaire général de l’Ordre, n’a pu atteindre ce but.